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Les soleils noirs de Zaho de Sagazan

Dernière mise à jour : 13 févr.



Une voix venue du fond des larmes, aux incantations rageuses. Des textes chargés d’ivresse couchés sur du papier brûlant. Des airs frondeurs bondissant de la chanson du patrimoine à la cold-wave allemande. C’est Zaho de Sagazan, 23 ans, originaire de Saint-Nazaire, passée par une école de gestion à Nantes avant de fixer ses vertiges dans la musique. Son premier album La Symphonie des éclairs, financé par elle - après avoir travaillé comme auxiliaire de vie à domicile - éblouit avec ses soleils troublants et ses ombres troubles. L'occasion de soumettre Zaho à l'interview Roulette Ruse. Une appli, des numéros tirés en aléatoire, chacun correspondant à une question.


6 Des chansons inspirées par des livres, des films, des expositions… ?

La Fontaine de sang est inspiré d’un poème de Baudelaire. Je ne sais pas si je l’ai bien compris à la première lecture mais j’ai tout de suite eu l’image d’une fontaine pillée par des humains, une métaphore des catastrophes écologiques. Les Fleurs du mal est toujours dans ma bibliothèque, je l’ouvre parfois au hasard et je saisis un mot, une image.

18. Plus d’amis ou d’amies ?

Autant. Je ne connais pas l’amour, l’amour romantique, l’amour passionnel, par contre j’éprouve des passions amicales pour des hommes et des femmes. J’écris des chansons d’amour en entrant dans un personnages pour ressentir des émotions sans les avoir jamais ressenti, mais j’ai des crush toutes les secondes, j’imagine toute une histoire comme le raconte Mon inconnu, le rêve est infini, et quand la chanson a été achevée, mon crush s'est achevé aussi.


21. La chanson d’un autre chanteur qui vous ressemble?

Bonne question. Je n’ai aucune notion en anglais mais j’ai ressenti, adolescente, une émotion si forte en écoutant les chansons de Tom Odell que cela m’a poussé à m’installer au piano et à chanter. J’ai très souvent eu l’impression qu’il écrivait pour moi, tellement j’étais transportée.




(C) Arno Lam

8. Comment naît une chanson, par exemple La Symphonie des éclairs?

Je l' ai écrite dans un avion. L’image que je voyais derrière le hublot m’a inspirée, j'ai fait le constat qu'il fait toujours beau au dessus des nuages, c'est évident, mais je ne l'avais pas vraiment capté, c'est un bleu complet. Après, on est allé dans les nuages, c'était encore plus beau, la lumière les traversait, j'en ai fait un refrain très météorologique, et j'ai creusé ensuite plus loin la métaphore.


Quels sont ces éclairs?

Ce sont des émotions très très fortes, généralement négatives, et qui, à la fois, nous rendent très vivants car plein d’énergie, comme les éclairs. De loin, c’est fascinant. De près, cela fait mal. Et en même temps, il n’y a rien de plus vivant que la tristesse - et la joie évidemment. Là, on évolue davantage dans les éclairs sombres. On ne contrôle pas un éclair, la seule chose qu’on puisse faire, c’est le regarder et l’aimer car il est très beau. Cela ne va pas trop ensemble la symphonie des éclairs, on n’en fait pas, mais au de l'envisager comme quelque chose d’horrible, j'ai voulu en faire quelque chose de très beau.



2. Ce que la musique a révélé de vous et en vous?

Le premier choc, c'est me rendre compte que ce que je prenais comme ma plus grande faiblesse dans la vie, c’est à dire ma sensibilité, qui m’empêchait de réaliser plein de choses, me rendait triste et incomprise, était la plus grande des forces, que l’on n’est jamais assez sensible. La musique m’a permis de placer ma sensibilité au bon endroit. Cela a été une grande résilience dans ma jeunesse de me dire: "ce que tu n’aimais pas, c’est la meilleure des choses et tu vas même en faire ton métier."


Vous êtes vous surprise vous-même à monter votre propre label, à vous produire sur scène?

Quand je me regarde de loin, je suis surprise de m’apercevoir que cette petite Zaho ne se posait aucune question. Je me suis assise un jour au piano et j’ai composé des chansons sans me demander si j’en avais le droit, la légitimité. Ecrire des chansons est devenu une obsession, et sur ce plan, je suis fière car je n’ai jamais douté, alors que j’ai très peu confiance en moi, en tout. Le seul domaine où j’ai eu confiance en moi, c’est la musique, alors que je chantais  très mal à l’époque, que je ne savais pas écrire. Comment cette petite Zaho de 15 ans qui faisait des chansons nulles, a pu penser qu’elle en écrirait un jour de bonnes? Je ne me posais pas de questions, je savais qu’en travaillant, j’allais apprendre et progresser.



7. L’album qui vous a particulièrement marquée ? Après avoir enregistré La Symphonie des éclairs pendant 3 semaines, je me suis retrouvée une semaine seule face à moi-même, je gère mal la solitude, très vite mes démons reviennent. J’ai écouté pendant 4 jours mon album d’une manière complètement obsessionnelle, passant de « c’est fabuleux ! » à « c’est horrible !». Je ne sortais pas, je ne me nourrissais pas… Un matin, j’ai décidé quand même de me balader et a surgi The Wall des Pink Floyd dans mes écouteurs. Je l’avais déjà beaucoup écouté sans vraiment en comprendre l’histoire, là j’ai vu ce mur que je construisais moi aussi, et quand le héros le casse et s’ouvre à la réalité, je me suis alors reconnectée au monde. Moi qui suis très rationnelle et ne crois pas aux signes du ciel, j’ai eu la sensation que le destin m’avait mis sur la route de cet album au bon moment.

1. Une histoire derrière votre prénom ?

Mes parents ont inventé les prénoms de mes trois soeurs aînées, de ma soeur jumelle et le mien, enfin ils ont cru inventer le mien car Zaho existait déjà, c’est le surnom de Zaïra.

35. Votre côté sombre et votre côté solaire ?

Je mets mon côté sombre dans la musique, pour canaliser mes émotions négatives, au lieu de les faire subir à autrui. Dans la vie, j’aime rire, faire du bien autour de moi, donner de l’énergie, de la motivation, de la bonne humeur.

32. Une chanson d’enfance ?

Avec ma grande soeur Thali, qui a 10 ans ans de plus que moi et est ma deuxième maman, on chantait beaucoup Phantom of the opera en duo. Quand elle a quitté la maison, j’ai arrêté le chant, ma voix était très aigüe à l’époque.






10. Ce que vos parents vous ont transmis ?

Ils m’ont donné des clés pour ouvrir les portes alors que beaucoup de mes copains se sont trouvés devant des portes aux serrures fermées. Ma mère m’a transmis sa passion des mots et de l’humain. Elle était institutrice, elle a une grande empathie et aide les gens par pure bonté. Mon père {Olivier de Sagazan, plasticien, peintre et sculpteur} est un exemple pour moi, il passait 8 heures dans son atelier, du coup, cela a mis la création au centre de la maison et engagé à créer.


9. L’artiste disparu que vous auriez aimé rencontrer ?

J’aimerais beaucoup boire un café avec Barbara, j’adorerais l’écouter, lui poser des questions, parler de la vie.





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